Ride the World in Style

Ride the World in Style
Kawasaki W650

Welcome to my nightmare

Oh moi je ne suis qu'un bouffon Messires !
Un acrobate verbal pour mieux vous faire rire,
Jongleur grammatical et n'étant pas bien né,
Je mendie les regards et fais des pieds de nez.
N'ayant que peu de foi en la nature humaine,
Je traque les fissures de ses allures mondaines.
Je dis les vérités que l'on déteste entendre
Et attire la haine quand je voudrais du tendre.
Mais mon vocabulaire est une bien piètre épée
Et je vous laisse Messieurs l'honneur de batailler.
Nish

samedi 30 janvier 2010

Nish Man - Onanisme



    Onanisme 


    Bon, c'est une chose entendue, les
    frustrations ne génèrent pas un équilibre idéal, m'enfin, plutôt
    que se pencher à en perdre l’équilibre sur les effets des envies
    variées qui nous sont offertes dans une société spécialisée dans
    leur fabrication, ne devrions-nous pas plutôt en sucer quelque-chose
    de plus substantifique ?


    J'ai eu l'occasion d’être frustré
    moi-même, si si, lors de mon séjour obligé, forcé et contraint,
    au sein des geôles équestres (c’étaient d'anciennes écuries) du
    monarque népalais. J'y ai demeuré quinze mensualités, c'est dire
    si je m’y connais en frustrations !


    La clientèle carcérale que j'eus
    le bonheur d'observer, était, comme partout je suppose, composée essentiellement
    d'hommes dans la force de l’âge, tous célibataires donc.


    La frustration sexuelle était palpable
    ! Un vrai brouillard de marécage dans l’atmosphère !


    Ceux à qui la nation monte au front,
    pourront toujours accuser les moeurs du tiers-monde pour expliquer l'usage
    du petit prostitué de seize ans, les sévices subis par le vendeur
    de femmes ou la présence d'une gamine de dix ans et d'une autre de
    quatre ans dans le lit du chef-maton (un prisonnier lui-même condamné
    à perpétuité). Je ne pense pas que ce soit très joli ni très Fleuri
    à Merogis non plus.


    Mais même sans s'occuper des égarements
    propres aux Himalayens, la différence d’intensité des frustrations
    sexuelles caucasiennes valait son pesant d’or aussi.


    Nous étions dix blanchâtres en
    tout et pour tout, du moins parmi les habitués. De vulgaires trafiquants
    de dope qui passaient deux semaines ou trois mois, il y en a eu plein
    mais c’était pas des gens sérieux, des désespérés injugés comme
    nous autres qui avions commis le délit suprême d'avoir préféré
    l'or à l’héroïne. Les trafiquants, le nez pale d'un smack népalais
    pas laid, sortaient vite du Népal, à moins qu'ils n'aient pas la somme
    demandée; mais ce n’était pas l'pal.


    Le manque d'espace représentait
    un excellent handicap à la bonne adaptation du nouvel arrivant. Il
    était si restreint qu'il était hors de question de dormir allongé
    sur le dos, position dite “deluxe”. On choisit pas son coté non
    plus, on s’emboîte dans la foule, allongé du même coté que les
    autres. C'est à peine s'il ne faut pas attendre que le mec devant vide
    ses poumons pour pouvoir respirer !


    Bref, le lendemain même de mon arrivée
    j'ai pu me rendre compte de certaines conséquences de certaines frustrations
    érotico-carcérales. C'est l’Américain derrière moi qui m'a réveillé
    en me secouant. Lui dormait encore...


    Heureusement que c'est solide les
    jeans !


    Ce n’était rien, les Américains
    sont bien élevés et même lorsqu'il me faisait part de ses fantasmes
    (bien hétéros d'ailleurs, on se calme), il n'y avait vraiment pas
    de quoi choquer un prêtre. D'ailleurs j'ai pu constater que même en
    rêves, il gardait le même rythme et la même position tout le temps...


    Lorsqu'à force de ruses et de brailleries,
    j'ai enfin pu élargir mon espace morpho-vital, j'avais un Anglais d'un
    coté et un Hollandais de l'autre.


    Nous faisions bon voisinage. A intervalles
    matinaux et réguliers, ces messieurs se soulageaient fort simplement,
    une main sous le duvet. Ils gardaient un équilibre mental peinard.
    De temps en temps le Hollandais évoquait sa copine avec un soupir mais
    jamais, pas plus que l'Anglais, il ne se serait laissé aller à me
    raconter des détails croustillants et intimes.


    L'Australien, toujours souriant et
    prêt à rendre service, se servait, puisqu'il n'y avait pas mieux,
    de quelques jeunes dealers népalais qui ne demandaient pas mieux. Aurait-il
    été dans la nature avec une brebis pour seule compagne qu'elle aurait
    fait l'affaire, j'en suis certain.


    Le Suédois était si jeune qu'il
    était vierge. Il l'avouait franchement mais ce qui m'intriguait le
    plus, c'est qu'il parlait de sexe comme de football. Violemment.


    Il semblait très ému par son fantasme
    préféré: violer sa première femme.


    L'Allemand était impénétrable.
    Froid, peu communicatif, il ne participait jamais aux conversations
    gauloises. Un Calviniste.


    Moi ? Ben j'ai résolu le problème
    à ma manière, j'ai acheté un cahier et je me suis écrit une histoire
    de cul bien assaisonnée dans le style des "Onze mille verges"
    d'Apollinaire en moins sanguinolent quand même. Lorsque mon cerveau
    me semblait un peu trop friand de testostérones malgré les endorphines,
    j'allais m'isoler un peu mieux que sous un sac de couchage quand même,
    avec mon cahier sous le bras. Heureusement pour la concentration d’ailleurs
    parce que qu'est-ce que ça puait !


    Le Portugais était très barré
    mais de temps en temps, il semblait se souvenir qu'il aimait bien les
    nanas et pour un bref instant, une lueur de gaudriole étincelait dans
    sa cornée mais très vite il replongeait dans ses délires vaudous
    mélangés de kung-fu et d’acuponcture.


    J'ai gardé le mec de Nouvelle-Zélande
    en dernier parce que lui, il faisait fort quand même. Sa frustration,
    il en faisait une vision, une religion ! Non content de nous décrire
    en détail les maladies vénériennes de ses prouesses pré-carcérales
    (et de nous les prouver d'ailleurs par les tonnes de lettres qu’il
    recevait de ses copines du Japon, de Corée, de Singapour, de Hong Kong
    et de Thaïlande principalement puisque c'est là qu'il travaillait),
    il fallait qu'il manifeste sa tension phallique en public. Il avait
    encore la lucidité de ne pas se masturber devant tout le monde. Il
    est certain que toute la prison serait venue voir mais il lui est arrivé
    de se balader en rond dans la cour, le sourire en coin et la bitte dodelinant
    devant son short. Ses orgasmes, eux par contre, étaient pratiquement
    retransmis dans toute le capitale. Il avait un don certain pour attendre
    l'assoupissement des murmures vespéraux et commencer son concert de
    gémissements qu'il terminait en général en râle bientôt imité
    par tous les râleurs de la chambrée qu'il empêchait de dormir.


    Il me faisait mourir de rire ce mec,
    du moins tant que j'ai pensé qu'il en faisait exprès pour emmerder
    le monde. J'ai commencé à douter le jour où il s’est mis à prendre
    l’apéro avec nous.  Nous arrivions à nous procurer une sorte
    de tonique médicamenteux dont le goût et la teneur en alcool n’était
    pas sans rappeler le Porto. Lui trouvait de bon goût de se masturber
    dans sa tasse avant de venir trinquer avec nous. Je rigolais moins.
     


    Que les forts en math cessent sitôt
    de s'esbaudir ! J'avais promis dix Caucasiens! Nous n'en sommes qu'à
    neuf. Soit !
     


    La dixième personne était caucasienne.


    Eh oui, de l'autre coté du mur,
    il y avait l’écurie - pardon, la prison des femmes où une jolie
    Suisse toute blonde et toute bouclée s’était laissée enfermer.


    Sa frustration, elle l'exprimait
    un peu différemment. D'abord ses cycles menstruels ont cessé. Puis
    elle s'est mise à se maquiller, à s'habiller et à se coiffer même
    pour aller au magasin de la prison, un boui-boui minuscule pourtant,
    sombre et lamentable, et servi par un affreux borgne à croupetons.
     


    Que s'est-il passé quand tout le
    monde a été relâché ? Quelle est l'histoire de chacun ? Moi j'ai
    attendu trois semaines encore, le temps de faire sortir ma copine. (Ben
    quoi j'en ai pas parlé !? Elle n’est pas caucasienne de toute façon
    !) Mais je suis un saint, c’est bien connu…
     


    Ah oui, j’avais promis une super-morale
    en plus en conclusion !! Pourquoi je m'avance comme ça moi !?


    Bon...


    Peut-on reprocher quoique ce soit
    à l'attitude d'aucun des dix incarcérés face à sa frustration ?


    Bien sûr que non, tout est resté
    parfaitement compréhensible et dans les limites du tolérable.


    L'un d'eux aurait-il tenté de violer
    un Nep ou un autre blanc qu’il se serait fait arrêter par les autres
    immédiatement.


    Ce qui prouve bien qu’il vaut mieux
    se faire embastiller dans un pays défavorisé plutôt que dans nos
    contrées civilisées et on est en droit de se demander pourquoi.


    Serait-ce que quelque-part dans notre
    morale judéo-chrétienno-populaire et répandue, le mauvais ne mériterait
    même pas le respect dû à l’être vivant ?


    Serait-ce l'influence apocalyptique
    des menaces sataniques, ou un fond de reste de goût pour l'art de la
    lapidation, ou encore un remugle d’arène néronesque où l'on tolère
    n'importe quoi dans la fosse ?


    Mais surtout, surtout, pourquoi laisser
    planer une ombre pareille dans nos sociétés ?


    Nish





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