Pourquoi
le goût du risque disparaît-il de chez nos contemporains ?
>”Je suis convaincu
que ce n'est pas en donnant aux gens la possibilité d’éviter
>de faire face à leurs
problèmes et leurs frustrations qu'on va améliorer la
>vie des hommes sur
terre, surtout celle de ceux qui ne seront jamais
>concernés, trop occupés
qu'ils sont à essayer de survivre.”
> Bubulle (Liste FrenchTalk)
Je constate simplement
qu'une société sans protections sociales comme Hongkong, est dix fois
plus dynamique qu'une société protégée comme la nôtre.
C'est une constatation
que je n'aime pas faire parce que je sais bien de quel coté je me serai
retrouvé pendant la Commune ou en 1936 ou même en 1968, je sais combien
de braves gens sont morts pour obtenir les droits sociaux et je sais
qu'ils avaient raison de réagir et de se battre mais bon, voilà, le
résultat est tellement merdique que je me retrouve en face de la nature
humaine en guise de problème à résoudre. La politique n'est qu'un
dérivatif, croyons aux votes, haïssons ou encensons nos dirigeants,
ça nous occupe. Le vrai problème n'est pas là.
Allez quoi ! La liberté
n'est pas dans une société d'assistance ! Que voulons-nous exactement
? La paix ET le bonheur ?
Le bonheur, qu'est-ce que
c'est ? La passion dans l'action ou la rêverie béate devant le petit
écran ?
Le bonheur n'est-il pas
dans l’évolution et le mouvement ?
L’évolution est trop
lente, elle use les nerfs ?
Alors ?
Faut-il devoir se battre
pour survivre et être heureux ? Haïssons-nous la paix ?
Ne nous réveillons-nous
qu'en situation de conflit et de compétition ?
Ça ne me plaît pas trop
de vivre dans une société comme ça mais en même temps, qu'est-ce
que je me sentais les poignets liés dans la nôtre qui était un peu
plus humaine !
Où est la solution ?
Je ne sais pas où est
la solution mes chéris, c'est pour ça que j’écris toutes mes histoires
à la con je crois. J'avais d'abord cru que les sociétés que je croisais
ne me concernaient pas. Je n'y participais pas, j'utilisais ses failles,
je m'en servais de mon mieux pour "surfer" ma vie sans trop
me forcer et surtout sans m'engager nulle part puisque de toute façon,
c'est pas un bonhomme qui va tout transformer. J'ai pas l'esprit grégaire
du tout, je n’adhère nulle part et rien ne me parait assez sérieux
pour que j'y participe de toute mon âme. Je sais qu'il y a des gens
qui se sont totalement investis pour d'autres, j'en ai rencontré certains
même mais, tout plein d'admiration que je sois, je ne peux pas les
imiter, je n'ai pas assez de foi en la nature humaine et j'aurais horreur
d’être récupéré puisque je crois que TOUT est lié au profit et
au pouvoir.
Partant de là, je ne travaille
pas, je ne vote pas, je ne politise pas, je ne défile pas et je ne
vais pas au café. A la place, je regarde et je me marre. Fastoche me
dira-t-on... Oui, si tu aimes la solitude. Je ris souvent jaune tu sais...
Bon, mais le jeune Corto
s'est ridiculement retrouvé embastillé chez des Moyenâgeux pour avoir
pensé que l'univers pouvait être son terrain de chasse. Pas assez
malin pour ça mais surtout, il ne faut pas se croire assez fort pour
prendre une société au bras de fer, même une société perdue au
fin fond de l’Himalaya. Les jeunes signes du Bélier se prennent souvent
les portes fermées en pleine poire, c'est ça qui les fait avancer
un peu. Moi, ma porte fermée, il y avait un symbole du Yin&Yang
de peint dessus et je suis resté des mois à le contempler. Je suppose
que j'ai fini par relativiser un peu sur tout, y compris moi-même.
En gros, c'est ce que racontera "RE: Sans titre, sans étiquette"
quand ce sera terminé.
J'ai donc changé de stratégie.
Au lieu d'arriver tout bardé d’égotisme et de me prendre les sociétés
au baby-foot, j'allais changer de jeu, j'allais jouer au flipper plutôt.
J'ai choisi Hongkong pour faire rouler ma petite boule. Pas mal, Hongkong,
tout y est permis ou presque. L'individu y est seul, c'est la loi de
la jungle.
Pour vous dire la vérité,
je suis assez frêle de constitution, naïf d'esprit, beaucoup trop
enthousiaste et finalement plutôt désintéressé. Un peu Candide en
blouson d'cuir. MAIS je l'avais facile, je suis blanc et à l’étranger,
ça donne tout de suite un avantage (avantage contre lequel j'ai ouvert
ma gueule tant et plus d'ailleurs m'enfin c’était là quand même
pour moi itou).
Résultat ?
J'ai exactement la vie
que je désirais... quand j'avais seize ans. Je bosse 9 heures par semaine,
il fait beau, je vois la mer, je fais ce qui me plaît, les femmes ont
les yeux en amande, mes gamines sont eurasiennes et trilingues, la fumette
ne manque pas, je m’éclate avec mes machines et Internet pratiquement
gratuitement, j'ai même mon espace privé au milieu de potes qui font
du rock ou des photos bref c'est génial, c'est exactement ce que je
désirais à seize ans, dans ma piaule d'ado en colère.
C'est génial ?
C'est beaucoup mieux en
tout cas que si j'étais resté au Mans dans mon poste de LEP. D'ailleurs,
vous lirez sans doute ça un jour, je n'y serais sûrement plus dans
mon LEP, je serais sans doute mort ou en prison ou junkie ou fou, comme
dit Bubulle, l’évasion évite peut-être à certains de craquer.
Je crois que c'est vrai. Après tout on ne sait pas combien de formes
prend l'instinct de conservation ni où il commence.
Seulement quand je téléphone
chez moi, ma mère que je n'ai pas vue depuis dix ans pleure parce qu'elle
vieillit, qu'elle n'a que moi comme môme et qu'elle ne connaît même
pas ses petites filles. Ma mère est comme moi, elle ne viendra pas
ici et je n'irai pas là-bas; ce poing de fer existe depuis 36 ans...
Je dis à mon père: "Non, je ne rentre pas, j'ai encore des trucs
à faire ici avant." A quoi il me répond que du coup c'est à
lui de supporter une épouse qui pleure sans arrêt. Lourd hein !? Surtout
que je n'ai pas la moindre intention de rentrer en fait. Quoi d'autre
?
Hélène a 6 ans, Sarah
en a 5. C'est seulement cette année que je commence à pouvoir communiquer
avec elles. Jusqu’à maintenant, elles ne parlaient quasiment que
le cantonais. Il n'y avait que Papa qui parlait français à la maison.
M'enfin ça y est, cette année je suis enfin devenu père. Grâce à
l’école française où elles baignent tous les jours, le français
leur est devenu aussi important que le cantonais.
Et vivre avec une Chinoise
qui n'est jamais sortie (sauf pour aller en prison) d'une ville coloniale
de 6 millions d'habitants et où la culture est confondue avec les loisirs,
vous croyez que c'est facile tous les jours ? Je n'ai jamais considéré
que ma femme devait épouser ma propre culture, pas plus que moi je
devrais épouser la sienne. C'est probablement très bien pour les gosses,
elles ont deux cultures elles. Pas moi, pas ma femme. Il y a deux mondes
chez moi, en rapport de force. Je ne peux plus supporter la télé cantonaise,
la bouffe cantonaise, le manque de goût, le manque d'amour ou d’intérêt
pour l'art, le cinéma, la littérature etc... Ma femme ne sait pas
ce que j’écris, elle s'endort si je traduis, elle n'a jamais vu mon
site WEB, elle ne sait pas comment fonctionne un BBS, elle pose ses
soupières brûlantes à même le chêne des tables Louis XV. Et moi
je ne respecte pas les traditions familiales, je ne parle pas cantonais,
je n'en fais qu'à ma tête. Alors vous savez quoi ? Je préfère souvent
rester dans mon bureau, j'y dors, j'y mange, je vous écris. Mes gosses
me manquent. Je ne sais pas si je dois divorcer ou pas. Je ne crois
pas que ça changerait quoique ce soit de me maquer avec quelqu'un d'autre
pour recommencer le même plan et je suis certain par contre que mes
gamines seraient contre.
Donc voilà la suite, le
deuxième tome de "RE: Sans titre, sans étiquette" que je
n’écrirai peut-être jamais parce que je ne vois pas très bien comment
je pourrais faire de l'humour avec ça. Quoique... j'arrive bien à
faire de l'humour avec le Népal, suffit d'laisser passer le temps.
En attendant, j'ai l'impression de vivre sur le fil d'une lame de rasoir.
Parfois je suis ahuri par la facilité de ma vie. Je n'ai vraiment pas
à me forcer beaucoup, c'est à trembler pour ma prochaine vie tellement
je me les roule dans celle-là. Parfois je suis assommé par le coté
vain et futile de mes journées mais je suis convaincu qu'il en va de
même pour TOUT le monde. Ça ne me console pas.
Tout ce que j'ai pu trouver
comme solution, c'est d’écrire un livre. Pas pour la gloire d'ailleurs,
j'ai simplement cette idée que je n'ai pas vraiment vécu comme tout
le monde et que peut-être, si j'avais lu mon propre livre à seize
ans, j'aurais pu arrondir un peu les angles de mes extrêmes et causer
un peu moins de larmes parce que ceux que j'ai fait pleurer le faisaient
parce qu'ils m'aimaient. J'ai beau éructer à qui mieux mieux, ce poids-là,
j’arrive pas à l’fumer.
Peut-être que si j'étais
plus riche, mon choix de vie ferait moins de mal aux autres ?
Mais je n'ai pas d'argent
et pour mes parents par exemple, je n'ai pas réussi du tout, je n'ai
fait que des conneries, bref, ils n'ont même pas cela pour se consoler.
Hélas, la fortune n'entrait
pas dans mes rêves d'ado. Mon idée c’était: Minimum de travail
pour ressources suffisantes. Ça aussi je l'ai réussi. Mais je vis
vraiment au jour le jour.
Vous allez me dire: "Mais
arrête de pleurnicher ! T'es con ! T'es un demeuré ! Qu'est-ce que
t'en as à foutre de tes rêves d'ado !? T'as 36 berges maintenant !
Arrête !"
Je ne sais pas ce que je
me suis fait dans la tête à 16 ans mais ça allait mal ! Je me souviens
qu'un jour, je me suis agenouillé devant les livres et les disques
qui reflétaient le mieux ma colère et ma révolte et dont je m’étais
entouré. Je ne sais plus ce que je venais de lire mais ça m'avait
fait le même effet qu’après la lecture du "Lion" de J.
Kessel quand j'étais gamin. Hirsute d'indignation, écoeuré d'injustice,
je me suis promis, juré, solennellement, de ne JAMAIS grandir, de ne
jamais oublier ma rage, de ne jamais participer au monde des adultes.
Heureusement que je n'ai pas fait ça plus tôt parce que je serais
resté nain comme dans "Le crabe-tambour". :)
Ben voilà, vingt ans plus
tard j'en suis toujours là en fait. J'ai plus que réalisé ma promesse
et maintenant j'en suis au bilan. Voilà pourquoi j’écris mes histoires
sans doute. Je m’arrête, je me retourne et je vous raconte.
Pour l'instant je ne peux
pas imaginer de troisième tome. J'ai perdu la pêche, j'ai perdu la
foi, je ne sais plus dans quelle direction aller parce que de toute
façon, il est trop tard pour revenir 20 ans en arrière, j'ai appris
trop de choses, j'ai l'impression d'y voir trop clair pour croire en
quoique ce soit. Il faut que je me l'invente, ma nouvelle direction.
Alors, pourquoi pas les
livres ?
Oui bien sûr mais on fait
pas une vie là-dessus. L’avez remarqué ? J'embellis, j'invente un
peu mais les faits sont bien réels. Je ne vais pas passer le reste
de ma vie à raconter le début non !? Je suis trop jeune ! C'est juste
en attendant, c'est juste pour y voir clair.
Nish (clown triste aujourd'hui)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire