Ride the World in Style

Ride the World in Style
Kawasaki W650

Welcome to my nightmare

Oh moi je ne suis qu'un bouffon Messires !
Un acrobate verbal pour mieux vous faire rire,
Jongleur grammatical et n'étant pas bien né,
Je mendie les regards et fais des pieds de nez.
N'ayant que peu de foi en la nature humaine,
Je traque les fissures de ses allures mondaines.
Je dis les vérités que l'on déteste entendre
Et attire la haine quand je voudrais du tendre.
Mais mon vocabulaire est une bien piètre épée
Et je vous laisse Messieurs l'honneur de batailler.
Nish

samedi 30 janvier 2010

Nish Man - Le service militaire



    - Nish
    bidasse -
     


    Quand j'étais ado, j'avais
    deux cauchemars, deux trucs qui décidément ne passaient pas et que
    je ne me voyais pas supporter: le travail et l'armée.


    J'étais mal barré. Bosser
    de 9 à 5, c'est pas donné à tout l'monde d'éviter, m'enfin moi,
    tout désolé et inquiet, je ne pouvais que conclure que ça n'était
    pas fait pour moi. Quelque chose m'empêchait d'obéïr aux ordres et
    me dégoûtait rapidement de toute tache répétitive. Dés qu'un petit
    chef levait la voix, je l'égorgeais d'une vanne coupante et il se sentait
    obligé de me virer pour rétablir son autorité. Dés que je m'ennuyais,
    je commençais à faire des conneries. Un jour, je m'emmerdais tellement
    derrière la caisse d'une station-service que j'en ai cassé l'estafette
    du patron en faisant une marche arrière à la Fangio ! Dans une autre,
    on m'a renvoyé après qu'un client se soit plaint au patron de m'avoir
    vu faire l'amour avec ma copine dans la vitrine de la boutique! Dans
    l'usine de rillettes ou j'ai échoué un été, on m'a viré le jour
    où, planqué dans une réserve, je m'amusais à démonter le moteur
    de la CX du grand-boss... Quand finalement un pote m'a fait rentrer
    à la SNCF, ils ont été malins, ils m'ont donné une mobylette et
    des courses à faire toute la journée, ils ne m'ont pas mis d'casquette
    et ils n'ont pas insisté sur le port de l'uniforme. On s'est bien supporté.


    Mais l'armée ? Comment
    se débarrasser de cette épine dans mon talon ailé ? Avec mon caractère,
    ça risque d'être un enfer. Je suis allergique aux adjudants et ça
    va s'savoir tout d'suite! D'abord je ne veux pas qu'on touche à mes
    cheveux, je ne veux pas porter d'uniforme, je ne veux pas toucher aux
    armes, je ne veux pas dormir dans un dortoir et je déteste manger à
    la cantine, pis j'veux des nanas. Non, le seul avantage que pouvait
    présenter l'armée, c'était de passer tous ses permis de conduire
    et franchement, le jeu n'en valait pas la chandelle. On m'avait dit
    aussi qu'on pouvait aller en prison pour refus d'obéissance. Ça, ce
    n'était pas vraiment grave mais là où j'ai méchamment tiqué, c'est
    quand j'ai appris que les jours de prison ne comptant pas comme des
    jours de service, on était obligé de se farcir du temps supplémentaire
    ! Le chantage ! Ou tu plies ou tu restes ! Laisse tomber, j'y étais
    encore dans dix ans c'était certain !


    Que faire ?


    J'n'étais pas tout seul
    à me poser la question d'ailleurs, on était bien une dizaine à se
    tourmenter les méningues, si on compte nos copines, autour de la cheminée
    de notre vieille ferme sarthoise déglinguée. C'était la pleine saison,
    on recevait tous à tour de rôle notre convocation pour les trois jours
    et nous cogitions derechef sur nos cas mutuels et respectifs. Bon, pour
    Jean-Mi, pas de problème, étudiant en psy, avec sa copine qui bosse
    au Planning, il lui est facile de se constituer un dossier médical
    en béton, son seul souci est de trouver la dose juste pour ne pas être
    catalogué comme grand débile.


    Alain nous a donné des
    sueurs froides. Il a joué sur le décès récent de son père et tout
    a bien marché jusqu'au moment où le psy de l'armée lui a fait remarquer
    qu'être réformé risquait d'entraver sa carrière. Du coup Alain a
    paniqué et, a-t-on idée, il a demandé une semaine de sursis pour
    réfléchir ! Nous l'avons tous regardé tristement pendant une semaine:
    "Mais non Alain, il t'a bien eu, personne n'en a rien à glander
    qu'tu sois reformé ou non.", "Putain, comment tu vas faire
    maintenant ? Ça va être coton de rattraper l'coup !" Il y est
    parvenu ! Il est retombé sur le même psy, lui a dit que sa décision
    était de ne pas faire l'armée et il l'a obtenu ! Si nous n'l'avions
    déjà tant été, nous en serions tombés babas, nous le sommes donc
    restés.


    Christophe, lui, a fait
    très fort. Christophe était un mec très calme d'apparence et de comportement
    mais totalement libre dans sa tête. Il s'était longuement promené
    en Afrique avec Thierry et depuis, il préférait rester à la ferme
    pour rêver, bouquiner et jardiner un peu. De temps en temps, il prenait
    sa 404 commerciale, un vestige du Sahara dont les portières étaient
    décorées de tags de fusils cassés, et il s'en allait, à la tombée
    du jour, pour piquer des bûches dans les forêts voisines. C'est le
    seul qui restait à la ferme le plus clair de l'année, nous avions
    tous une piaule en ville pour quand il fallait bosser un peu. Christophe
    prenait les jours comme ils venaient, assis près de la cheminée, les
    cheveux sur les épaules, de petites lunettes rondes sur le nez, il
    lisait. Un jour, il nous a annoncé qu'il partait aux trois-jours. Panique
    dans les vieilles pierres ! Quoi ! Depuis quand tu l'savais !? Pourquoi
    t'as rien dit !? Qu'est-ce que tu vas faire ? T'as pensé à un plan
    ? Non, Christophe n'avait pas de plan. Il est parti et quand il est
    revenu, il nous a dit calmement qu'il devait se présenter à la caserne
    de Rennes trois mois plus tard pour commencer son service. Un ange gêné
    passe en voltigeant, nous nous sentons mal pour lui, c'est pas possible
    quoi, Jean-Mi va lui faire un dossier, il s'est déjà occupé de Thierry
    qui, avec son passé houleux, ne peut simplement pas prendre ce risque.
    Non, non, Christophe ne veut pas, c'est bon, laissez tomber, vous bilez
    pas pour moi. On se dit que de Christophe, on peut s'attendre à tout
    et qu'il n'est pas assez stoned pour ne pas avoir sa petite idée. Trois
    mois plus tard, il est parti. Il ne nous a rien dit sinon salut et il
    est parti. Deux jours plus tard, il était de retour. Il avait toujours
    ses cheveux noirs bouclés à la Géronimo et il portait un sac à dos
    kaki. Son petit sourire promettait une histoire juteuse. On le laisse
    poser son sac, on lui roule un pétard, on lui sert un mug de thé...
    Alors ?


    -"Ben rien... J'me
    suis pointé à leur caserne, j'ai montré mon papier, ils m'ont fait
    rentrer puis j'suis passé devant une sorte de comptoir où on m'a donné
    tout ça." dit-il en désignant le sac kaki du doigt. "Après,
    ben au lieu d'suivre les autres, j'ai fait demi-tour, je suis sorti
    de la caserne sans que personne ne me demande rien, je suis allé à
    la gare et j'ai pris le train pour aller voir Sophie. Le lendemain j'ai
    téléphoné à mes parents pour leur dire qu'ils allaient sûrement
    recevoir la visite des gendarmes et mon père m'a dit de pas m'inquieter,
    qu'il allait leur dire ce qu'il en pensait de l'armée et les flanquer
    dehors sans se gêner. On a rigolé et me voilà. Comme personne ne
    sait que je suis ici à part vous, Sophie et mes parents, je suis peinard."


    Peinard et déserteur !
    J'ai des copains d'enfer ! En plus on va pouvoir jouer au scout avec
    le matos de l'armée ! Christophe n'a jamais été attrapé par les
    gendarmes, il est mort trois ou quatre ans plus tard, un jour qu'il
    traversait une avenue avec Thierry, à Paris où il n'allait presque
    jamais. C'est une Rolls Royce qui l'a tué. On a encore tous les boules...
    J'peux plus voir Samothrace en sculpture sans penser à sa sépulture.


    D'autres potes se sortaient
    de l'épreuve en avalant des litres de café et des pilules variées
    avant de se présenter aux guichets verdâtres. La plupart du temps,
    ça marchait mais quelques-uns ont exagéré leur numéro et se sont
    retrouvés en observation à l'hôpital psychiatrique. Là, ils ont
    dû joué la comédie pendant parfois une semaine, dans une ambiance
    de parano pas triste, avant d'être relâchés. Pas cool du tout ! Y'en
    a un qui n'a pas tenu et qui s'est donc retrouvé en Allemagne... Bref
    chacun avait sa petite idée pour régler le problème et moi, ça faisait
    bien six mois que je m'étais décidé sur la marche à suivre.


    Quand j'avais 10 ans, pour
    les vacances de Noël, mes parents m'avaient envoyé dans une colonie
    de vacances en Savoie au Châlet des Écureuils pour y devenir un skieur
    chevronné, enfin, pour au moins y décrocher ma première Etoile. Un
    soir alors que je prenais ma douche en sifflotant la Madelon, le moniteur-garde
    chambrée est entré en fermant la porte derrière lui. Il semblait
    très en colère pour une raison que j'ignorais complètement et, après
    m'avoir copieusement et bruyamment déclaré à quel point il en avait
    par dessus la tête de ma présence, il m'a soudain donné trois choix
    de punitions:


    1. Je te descends à poil
    dans le dortoir des filles pour qu'elles se foutent de toi.


    2. Tu fais ce que je te
    dis d'faire.


    3. Je dis à tes parents
    que t'as été infect tout l'séjour.


    Là-dessus, il me donne
    5 minutes pour réfléchir et me décider et il sort en me laissant,
    éberlué et enfermé à clé dans les douches pleines de vapeur. Quand
    il est revenu, je ne savais pas trop bien ce qui s'passait ni ce que
    j'étais censé répondre mais quand même, ça ne me semblait pas très
    clair, pas très normal tout ce foin pour rien alors je lui ai dit de
    raconter ce qu'il voulait à mes parents. Tout sévères et bouchés
    qu'ils puissent être, ce n'était pas très grave, les torgnoles, je
    connaissais. Alors, il m'a envoyé m'habiller. Mes fringues étaient
    à l'autre bout de la salle de bain, dans un coin. J'y suis aller tout
    maigre et tout nu, je me suis séché et j'ai enfilé mes vêtements
    dans le silence en sentant le regard du moniteur dans mon dos. Puis
    je me suis retourné et je me suis rendu compte qu'il avait son pantalon
    sur les genoux et qu'il tenait son zizi dans sa main. Ça m'a donné
    envie de rigoler mais quelque chose me disait qu'il ne valait peut-être
    mieux pas. Il m'a demandé de lui tailler une pipe. Bon, ben j'avais
    que dix ans et je balisais un peu mais j'ai quand même réussi à dire:
    -"ok, pis après on descend chez l'directeur." Heureusement,
    ça a suffit à le faire débander.


    Cette histoire, que j'avais
    commis l'erreur de raconter dans mon lycée, m'avait collé une sale
    réputation et assez d'ennuis pour qu'elle me serve à quelque chose
    aujourd'hui. J'allais gonfler un peu les choses, m'affaiblir un rien
    le psychisme et ça devrait passer; avec une phobie des dortoirs, une
    phobie des douches communes et une insécurité dans les milieux exclusivement
    masculins, je devrais pouvoir me sortir des sales draps militaires...
    J'ai donc bouclé mon sac Mao, celui où j'avais marqué "J'ai
    vingt ans et je ne veux pas...", j'ai enfoncé ma boite de pétards
    dans la poche de ma veste, mes pieds dans le cuir de mes bottes et je
    suis allé à la gare du Mans où j'ai pris le train pour Rennes avec
    mes lunettes fumées et mes longs tifs bouclés. Vingt minutes avant
    l'arrivée, je me suis enfermé dans les chiottes pour fumer un petit
    joint et quand je suis ressorti, j'ai commencé à enfiler mon rôle.


    Je m'adosse dans le coin
    près de la porte d'entrée, maussade et l'air renfrogné. Mon petit
    joint m'aide à créer l'illusion. Je ne regarde plus personne dans
    les yeux, mes regards se font furtifs, évasifs. Je laisse l'angoisse,
    l'inquiétude monter en moi au lieu de repousser le trac. Après tout,
    il va falloir jouer serré. Des gens passent en remontant les compartiments.
    Certains mecs, à peu près du même âge que moi, me lancent un coup
    d'oeil au passage. Allons-y pour un petit coup de parano, je me dis
    que ce sont peut-être des appelés et je me renfrogne d'avantage.


    Arrivé à Rennes, je sors
    de la gare et j'aperçois l'autobus militaire qui attend devant. Je
    traîne mes semelles et je m'approche quasiment à reculons. Dans l'autocar,
    je vais m'asseoir au fond et je ne dis rien à personne. Il y a des
    mecs qui font des blagues en s'balancant de grandes claques dans le
    dos. Ça sent déjà sa chambrée... Ambiance colonie d'vacances pour
    grands dadets. Je regarde mes bottes, immobile et silencieux. Le bus,
    après avoir remonté une sorte d'allée royale bordée de grands arbres,
    entre dans une caserne et va se garer devant un bâtiment moderne et
    bien vitré. Ça sent l'architecture psychologique, le jardinage pensé,
    l'accueil encourageant mais hum, j'ai l'oeil ! Lentement, le car se
    vide et une queue se forme devant l'entrée. Les premiers bizuths sont
    déjà à l'intérieur, devant les guichets où des bidasses consultent
    leurs papiers militaires en les comparant à leurs listes. Doucement,
    graduellement, je me rapproche des portes vitrées. Je suis presque
    devant lorsque je remarque un grand écran de projection installé sur
    la droite, à l'intérieur. Le commentaire ne m'arrive qu'en murmure
    mais je regarde les diapos. Soudain, j'ai ce qu'il me faut ! La diapo
    représente la salle de bain d'une caserne avec ses douches communes.
    Il y a même un mec qui montre ses fesses sur la photo. Je m'immobilise
    à deux pas de l'entrée. Les types derrière, passent devant moi en
    maugréant. Je ne bouge plus, les yeux fixés sur l'écran de projection.
    La file file devant moi. Je reste en arrière, je n'entre pas. La queue
    se rétracte jusqu'à ce qu'il ne reste plus que trois jeunes mecs devant
    les guichets et enfin, l'un des uniformés me repère de derrière son
    comptoir, planté devant la porte vitrée, figé.


    -"Hé ! Vous ! C'est
    par ici qu'ça s'passe !" gueule-t-il comme dans un PMU.


    Je ne bouge pas, je ne
    le regarde pas, je mate l'écran mais je commence à trembler légèrement.
    Je crispe les muscles de mes mollets, de mes cuisses, dans mon ventre
    et dans mon dos, dans ma nuque et dans mes bras très vite et comme
    si je faisais passer un courant électrique irrégulier et je me mets
    à trembler.


    -"Hé ! C'est à vous
    que j'parle ! C'est pour aujourd'hui ou pour demain ?"


    Là, je le regarde, je
    tourne la tête vers lui d'un mouvement brusque et j'ordonne à mes
    yeux de se remplir de larmes. Et c'est ce qu'ils ont fait ! C'est rare
    ces moments où la concentration devient telle qu'on arrive pratiquement
    à tout capter, à tout voir, à analyser une situation en un clin d'oeil
    et à faire de son corps ce que l'on veut, mais c'est possible, ça
    arrive; grâce à l'adrénaline, je sais pas... Bref, le caserné voit
    mes larmes, s'esclaffe, ameute son collègue qui s'esclaffe aussi, parfait
    jusque là. Il s'avance vers moi.


    -"Ben quoi ? Faut
    pas être timide comme ça ! Allez, venez signer l'registre, on va pas
    vous manger !"


    -"J'lui avais bien
    dit ! J'lui avais bien dit qu'ce serait pareil ! Mais évidemment, comme
    d'habitude, elle n'a pas voulu m'croire !" dis-je à mi-voix, l'oeil
    vague, la tête baissée.


    -"Hein !? Qu'est-ce
    que tu racontes ? Allez suis-moi !"


    -"A quelle heure est-ce
    que le bus retourne à la gare, j'veux rentrer chez moi maintenant."


    -"Mais tu ne peux
    pas rentrer chez toi ! Il faut que tu signes le registre !"


    Je fond en larmes.


    -"Non, j'lui avais
    bien dit à maman qu'il fallait pas que j'vienne, mais elle a pas voulu
    m'croire encore, elle me croit jamais mais regardez ! C'est les mêmes
    douches que là-bas ! Moi, j'veux pas rester ! J'veux rentrer tout d'suite
    !"


    Le type fronce les sourcils
    et commence à me regarder de manière étrange. Putain, ça marche
    !?


    -"T'essaies d'me bourrer
    l'mou là hein ? Mais c'est pas ici qu'il faut la faire ta salade, c'est
    devant le psychiatre, moi tu sais, j'm'en fous !"


    -"Moi, j'm'en vais
    tout d'suite de toute façon."


    Et je fais demi-tour.


    -"Si tu t'barres,
    c'est les gendarmes qui viendront t'chercher!"


    -"Ils peuvent pas,
    j'habite chez ma maman ! Vous pouvez pas envoyer les gendarmes chez
    ma maman, elle m'défendra !"


    -"Eh bien vas-y chez
    ta maman, tu verras bien!"


    Je reviens sur mes pas.


    -"Il faut pas envoyer
    les gendarmes chez ma maman, vous la connaissez pas, elle est vraiment
    très sévère !"


    Le regard étrange plonge
    encore une fois dans mes yeux noyés, j'y mets toute la détresse que
    je peux imaginer.


    -"Écoute, si tu veux
    pas qu'les gendarmes aillent chez toi, il faut que tu viennes à l'interieur
    ok. Il t'arrivera rien je t'en donne ma parole."


    Je rechiale.


    -"Non, j'ai bien vu
    la photo ! J'veux pas ! J'veux pas, y'a plein d'garçons!"


    Ses yeux se marrent mais
    il sourit à peine.


    -"Oui, ça, à l'armée,
    y'a beaucoup d'garçons."


    -"J'veux pas aller
    dans un dortoir, j'peux pas dormir, j'ai peur ! Je veux rentrer chez
    moi, s'il vous plait!"


    -"Mais qu'est-ce que
    ça peut t'faire les dortoirs ? Il peut rien t'arriver ! Écoute, viens
    avec moi, on va voir ce qu'on peut faire. Je vais t'emmener à l'infirmerie."


    -"Pourquoi faire !?
    J'suis pas malade ! J'veux pas ! Qu'est-ce que vous voulez m'faire !?"


    -"Rien du tout, tu
    vas aller voir le docteur et tu pourras t'expliquer et peut-être qu'il
    te laissera rentrer chez toi."


    -"Ce soir ?"
    dis-je l'oeil brillant, un zeste d'espoir dans le ton.


    -"Ah ça j'peux pas
    t'dire mais peut-être oui, pourquoi pas. C'est lui qui décidera. Alors
    tu viens ?"


    -"On va voir le docteur
    hein ? C'est pas pour aller dans les douches ?"


    -"Mais non, qu'est-ce
    qu'on irait faire dans les douches ? Allez viens, t'inquiète pas."


    À l'entrée, je marque
    à nouveau un arrêt. Il est devant moi, il s'arrète aussi.


    -"Ben dépêche-toi!"


    Je ne bouge pas. Il revient
    sur ses pas et me prend par la manche. Je fais un saut en arrière,
    me dégage et crie:


    -"Me touchez pas !"


    -"Bon d'accord mais
    tu me suis !"


    Je le suis. Une foule de
    bidasses et d'appelés s'est formée dans le hall d'entrée pour assister
    à la scène. Je traverse une haie de mecs et j'essaie de ne pas me
    marrer. Je marche la tête basse, en serrant mon sac sur mon ventre.
    J'essaie de ressembler à une nana dix minutes après son viol. J'dois
    vraiment pas avoir l'air net parce que personne ne se marre plus. C'est
    bien, je me sens vraiment tout seul, vraiment tout moi, dans une peau
    qui n'est pas la mienne, un endroit dont j'aimerai bien me tirer et
    face à un futur que je m'efforce d'éviter. Je n'dois faire confiance
    à personne. Je suis complètement retranché dans mon cerveau, tout
    ce que je montre ou dis est feint, tout ce que je vois, entends, perçois,
    je l'analyse dans les moindres détails comme si c'était une boussole
    dont je me sers pour avancer dans le brouillard. En fait, c'est drôle,
    je me sens comme si j'étais piègé dans un combat, j'essaie de m'en
    sortir coûte que coûte et j'ai peur. Mêmes mes ennemis sont en uniforme
    dis-donc ! Je suis mon bidasse jusqu'à l'infirmerie et il me dit de
    m'asseoir sur un lit.


    -"Je ne veux pas faire
    la sieste !" je lui gémis au moment où il s'en va.


    Il me jette un long coup
    d'oeil, hausse les épaules et sort. J'attends un bon moment, agité
    de soubresauts volontaires, les bras enroulés autour des genoux, assis
    en boule, dans la pénombre, sur mon lit d'infirmerie. Après dix bonnes
    minutes, voilà le toubib qui arrive, typique, en blouse blanche, avec
    des lunettes à carreaux tellement épais que ça lui donne un regard
    de St Bernard, on s'attend à le voir baver.


    -"Alors, qu'est-ce
    qui ne va pas ?" me lance-t-il d'un ton d'un qui n'a vraiment pas
    de temps à perdre avec des blagues. Je ne réponds pas.


    Silence.


    -"Vous avez entendu
    ma question ?"


    ...


    Les minutes passent. Je
    tremble.


    -"Vous allez rester
    sur ce lit longtemps ?"


    ...


    Je murmure:


    -"Est-ce que j'pourrais
    rentrer chez moi s'il vous plait ?"


    -"Ah ça non ! Ce
    n'est pas possible ! Il faut passer les tests et tout ça !"


    Vlan, je refonds en larmes,
    ça lui apprendra à être sensible avec les débiles profonds.


    -"J'veux pas rester
    ici ! Laissez-moi rentrer à la maison ! J'veux pas aller dans un dortoir
    ! Laissez-moi partir !" je pigne en bêlant.


    -"Mais enfin calmez-vous
    ! Il faut passer les tests je vous dis ! Pourquoi ? Qu'est-ce qu'il
    y a avec les dortoirs ?"


    Je me tais. Je baisse les
    yeux, je renifle un coup et je me tais.


    -"Écoutez, si vous
    voulez que je vous aide, il faut me dire ce qui ne va pas, sinon moi
    j'appelle une ambulance et on vous emmène chez les fous, c'est aussi
    simple que ca !"


    -"Parce que j'ai peur
    dans les dortoirs. J'veux pas y aller."


    -"Pourquoi ? Il vous
    est arrivé quelque chose dans un dortoir ? Allez-y, vous pouvez m'raconter,
    ça reste entre vous et moi. Qu'est-ce qui s'est passé ?"


    -"Vous l'direz à
    personne c'est sûr ?"


    -"Bien sûr que non
    ! Alors ?"


    Alors, avec force soupirs,
    après lui avoir fait jurer 10 fois qu'il ne dirait rien, surtout à
    ma mère, la larme à l'oeil, l'épaule tressaillante, je lui raconte,
    un rien exaggérée, mon histoire de colonie et je la termine, proche
    de la crise de nerfs, en le suppliant de ne pas m'envoyer dans un dortoir.


    -"Mais non, tu vas
    rester ici, à l'infirmerie. On va te donner une chambre juste pour
    toi, tu seras tout seul. Tiens, viens, prends ton sac et suis-moi, je
    vais te montrer où c'est."


    Je n'en crois pas mes oreilles
    ! Ça marche ! Génial ! Un piaule pour moi tout seul ! Il y croit !
    Dans le couloir, il fait signe à un infirmier qui lui passe un trousseau
    de clés. Je l'entends qui parle de calmants aussi. Je le suis et il
    ouvre une porte. Ma chambre. Vue sur la pelouse, c'est gentillet. L'infirmier
    arrive, un seringue à la main !


    -"Eh qu'est-ce que
    c'est que ça !" j'm'exclame en me levant d'un bond du sommier.


    -"Calmez-vous !"
    me répond l'toubib "c'est juste un calmant. Vous n'allez pas me
    dire que vous n'en avez pas besoin ?"


    -"Euh, c'est quoi
    ?"


    -"Du valium, ca va
    vous aider à vous relaxer, vous allez voir."


    -"Où est-ce que vous
    allez planter l'aiguille ?"


    -"Ben dans la fesse.
    Baissez votre pantalon."


    -"Non mais ça va
    pas ! Alors là sûrement pas ! Putain qu'est-ce que j'disais !? Ça
    fait pas une heure que j'suis là et il faudrait déjà que j'montre
    mes fesses ! Pourquoi d'abord hein !? J'ai pas besoin d'médicaments
    ! Et puis pourquoi pas dans l'bras hein ? Ou dans l'épaule !?"
    dis-je en fulminant.


    -"Allez ! Juste un
    peu, on vous pique en haut d'la fesse, regardez, on vous touche pas
    !"


    -"Aïe !"


    -"Voilà ! Terminé
    ! Massez-vous vous-même avec ce coton. Maintenant vous allez vous allonger.
    Vous avez faim ?"


    -"Non."


    -"Ça vaut mieux avec
    le valium de toute façon. Dormez et on verra ce qu'on peut faire demain
    matin d'accord ?"


    -"D'accord."


    -"Vous voulez que
    je ferme à clé ?"


    -"Oui s'il vous plait!"


    -"D'accord, pas d'problème,
    je ferme à double tour et je donne la clé au garde. Ça va ?"


    -"Oui... merci."


    -"A demain. Bonne
    nuit."


    La porte se referme. Je
    ne bouge pas. Soyons parano jusqu'à l'os. Je regarde partout. Pas de
    caméra de surveillance, rien, c'est juste une chambre d'infirmerie.
    Je me redresse, sourire aux lèvres. Je ne fais pas de bruit mais je
    me marre. Le valium fait son effet mais j'attrape ma veste. C'est un
    must ! Je dois fumer un pétard à l'armée ! Je n'en aurai peut-être
    jamais plus l'occasion ! J'ouvre la fenêtre, j'allume mon joint et
    je m'affale sur l'oreiller. Pfft ! Lourd le valium ! Aaaah ! Je suis
    béat ! Tout marche comme sur des roulettes et mes trois-jours à l'armée
    tournent en séjour à l'armée, pas mal...


    Ça faisait longtemps que
    je ne m'étais pas endormi avec les poules et elles sont encore là
    au réveil. Tiens, pas d'clairon... Va-t-on m'apporter des viennoiseries
    avec le drapeau bleu-blanc-rouge dessus ? Non, on m'apporte bien le
    petit-dèj sur un plateau mais ce ne sont pas des viennoiseries, pas
    même des dim-sums, juste des tranches de baguette. De toute façon,
    ce n'est pas ça qui m'ennuie le plus, non, ce qui m'ennuie le plus,
    c'est que je connais l'infirmier qui vient de m'apporter mes tartines.
    Il ne m'a pas encore reconnu mais moi je sais qui c'est, c'est le mec
    qui jouait du Michel Fugain sur sa guitare l'autre jour chez ma voisine.
    Et merde ! Putain j'espère qu'il est cool mais j'sais pas quoi faire.
    J'lui dis bonjour ou quoi ? J'fais semblant de rien ? C'est risqué
    s'il s'exclame tout soudain devant quelqu'un d'autre... Que là, on
    est tout seul...


    -"Euh, salut ! Tu
    m'reconnais pas ?" lui dis-je en chuchotant presque.


    Il me dévisage.


    -"Ah si !"


    Je mets mon doigt sur mes
    lèvres. Il va fermer la porte.


    -"Si j'me souviens
    d'toi. Rue des Terrasses, c'est ça ? Il m'semblait bien aussi en entrant..."


    -"Ça va ? Qu'est-ce
    tu fous là ?"


    -"Ben tu vois, j'fais
    mon service comme infirmier ici, c'est pas trop mal."


    -"Ah ben tu dis rien
    ok, mais moi j'essaie d'me faire réformer alors si tu pouvais faire
    comme si tu me connaissais pas, ça serait vraiment cool tu comprends
    ?"


    -"Ok, t'en fais pas,
    j't'ai jamais vu !"


    -"Merci, t'es sympa."


    -"Ok, salut et bonne
    chance!"


    Il s'en va. Pfff, c'est
    bien ma chance encore ce plan ! Bon, j'ai pas faim mais une petite tasse
    de café, pourquoi pas ? Je viens à peine d'avaler la dernière gorgée
    qu'un type en uniforme, la cinquantaine grisonnante, entre sans frapper
    dans ma chambre, m'ordonne de le suivre et ressort avant que j'ai eu
    le temps de reposer ma tasse. Bon, pas d'affolement, je mets ma veste,
    rassemble mes affaires, je les fourre dans mon sac que je pose sur mes
    genoux en m'asseyant sur le lit, le dos tourné à la porte. Bien sûr,
    trente secondes plus tard l'autre tornade kaki refait son entrée.


    -"Et alors !? Je vous
    ai demandé de me suivre !"


    Je rentre la tête dans
    mes épaules et je me remets à trembler.


    -"Mais vous êtes
    sourd ou quoi !? Suivez-moi !"


    Petit effort mental, ça
    y est, ça coule. Je tourne ma pauvre tête en larmes vers lui.


    -"Je peux rentrer
    chez moi maintenant ?"


    Il me dévisage, un rien
    interloqué.


    -"Attendez-moi ici."


    Il repart et revient cinq
    minutes plus tard avec un autre toubib.


    -"Bon, vous allez
    suivre ce monsieur, hein, c'est juste pour aller chercher l'argent que
    l'armée vous donne pour être resté ici, vous signez un papier, un
    reçu et c'est tout."


    -"C'est pas un papier
    pour s'engager dans la légion hein ? Vous allez pas m'envoyer dans
    le désert ?"


    -"Mais non ! Non mais
    qu'est-ce qui vous fait penser une chose pareille !?"


    Bon, s'il s'agit de se
    faire un peu d'argent de poche peinard, pourquoi pas hein ? Je suis.
    Oui, mais avant d'empocher mon argent, ils me l'ont fait gagner à la
    sueur de mon front ! Ils m'ont d'abord fait asseoir dans le même hall
    d'entrée que la veille, en face de trois bidasses qui ne m'ont pas
    quitté des yeux et comme j'étais censé trembler, eh bien c'est ce
    que j'ai fait en fixant mes godasses pendant une bonne demi-heure. Fatiguant
    ! M'enfin bon, c'était l'armée après tout, valait mieux ça qu'faire
    des pompes dans la boue sous la pluie d'un mois d'novembre lorrain.
    Finalement, on m'a tendu un sac en plastique plein de pièces de monnaie
    et on m'a dit de suivre. Comme je commençais à prendre le pli, j'ai
    suivi.


    C'est à ce moment-là
    que j'ai compris que j'aurais peut-être pu me passer de trembler tout
    à l'heure. C'était bon, on m'avait cru, on ne doutait plus de ma débilité,
    on me croyait sans doute un rien suicidaire ou évasif mais on croyait
    à mon histoire. La salle dans laquelle on me faisait pénétrer ressemblait
    à n'importe quelle salle de classe d'un bon vieux lycée de province.
    Les bancs étaient tous occupés de futurs jeunes fleurons de la Patrie,
    tous sauf ceux du coin gauche, devant l'estrade. Le bidasse qui m'accompagnait
    me dit de m'asseoir juste devant à gauche, si bien qu'il n'y avait
    personne ni derrière moi ni à ma droite. Ouah ! Que d'égards ! Il
    s'agissait en effet de faire le test de quotient intellectuel. Le test
    commença avec une poignée de mecs qui levaient la main pour dire qu'ils
    ne savaient ni lire ni écrire. Ça m'a soufflé ! Hein ? En France
    et en 1979 ? Eh, je n'avais pas encore enseigné, j'savais pas ok ?!


    On distribue les feuilles
    et moi je me dis que finalement, rien, dans mon histoire, ne m'oblige
    à massacrer mes réponses. A la limite, ça risque de se voir. Non,
    ok, j'vais les faire sérieusement leurs tests. Environ deux heures
    plus tard, on fait sortir le reste de la salle, puis moi. On me raccompagne
    à ma chambre où mon déjeuner est déjà servi. De la purée ! Comment
    savaient-ils que j'adorais ça !? Les services secrets sans doute...
    On est tous fichés dans ce pays ! L'infirmier qui est venu me desservir
    m'a demandé si je voulais assister à la séance de cinéma projetée
    pour tout le monde. Merci Firmin, mais je suis las, cet après-midi,
    je resterai consulter quelques ouvrages littéraires dans mes appartements.
    Remerciez le Général pour moi. Eh eh ! Rien à faire de l'après-midi
    ? Parfait ! Hop, un petit pétard de derrière les fagots et je m'enfonce
    douillettement dans "La vallée des rubis" de Joseph Kessel.
    Vers sept heures on m'apporte mon dîner que j'avale en un tour de main.
    Deuxième petit tarpé et je sombre dans mes toiles. C'est sain l'armée.


    Le lendemain, après le
    petit déjeuner, je suis censé passer des tests médicaux mais l'infirmier
    ne sait pas quoi faire. Rien n'a été prévu apparemment pour m'isoler
    des autres. Il me laisse en compagnie d'un groupe de quatre gradés
    grisonnants et d'un cinquième en treillis de combat. Les pépés sont
    joviaux, ils ont entendu parler de moi et s'étonnent:


    -"Mais enfin je n'comprends
    pas, j'ai regardé les résultats de vos tests, vous êtes étudiant,
    comment tout cela est-il compatible avec euh... votre... euh... votre
    gène ?"


    -"Ah mais dans la
    vie normale ça va parce qu'il y a les filles. Quand il y a les filles,
    je me sens bien."


    -"Oui mais enfin,
    avec vos études, vous serez sans doute appelé à enseigner, comment
    ferez-vous ?"


    -"Oh les écoles sont
    mixtes maintenant, il n'y a pas d'problème."


    A ce moment je sens un
    mouvement à ma droite; c'est le type en treillis qui se recule pour
    lire ce qui est inscrit sur mon sac. Hmmm, pas conseillé ça... Je
    place mon bras devant le graffiti, l'air de rien.


    Les test médicaux se passent
    sans encombre. Il faut encore que je reste une nuit pour voir le psy
    demain. Je n'ai plus rien à fumer mais ce n'est pas la peine, je passe
    la soirée à me barricader dans mon rôle, à me poser des tas de questions,
    à y répondre. Faut qu'j'assure ! C'est le psy qui me réforme !


    Le lendemain, je passe
    encore un test visuel puis on m'emmène dans le bureau du freudien de
    corvée. Il me fait asseoir en face de lui, devant son bureau surchargé
    de papier comme si on n'était pas à l'armée.


    -"Bon, monsieur euh...
    Leclerc. Oui. Vous avez un problème alors il parait ? Tout le monde
    parle de vous ici !"


    -"Vous le direz pas
    à ma maman hein ? Surtout que j'ai pleuré parce qu'elle m'a fait promettre."


    -"Où habitez-vous
    ?"


    -"Chez maman."


    -"Vous avez encore
    votre père ?"


    -"Oui."


    -"Quelle est votre
    profession."


    -"Je suis étudiant."


    -"Qu'est-ce que vous
    étudiez ?"


    -"L'histoire."


    -"Pourquoi l'histoire
    ?"


    -"Parce que ma maman
    pensait que ce serait intéressant."


    -"Ça ne vous plait
    pas ?"


    -"Oh si !"


    -"Le docteur qui vous
    a reçu m'a parlé de votre histoire en colonie de ski, vous en avez
    parlé à quelqu'un, à votre famille par exemple?"


    -"Non, j'ai trop peur
    !" dis-je l'air menteur


    -"Mais peur de quoi
    ?"


    -"De ce que Maman
    dirait !"


    -"Qu'est-ce qu'elle
    dirait à votre avis ?"


    -"Elle me croirait
    pas mais si elle me croyait elle serait pas contente !"


    -"Vous lui en avez
    parlé alors ?"


    Je baisse la tête. -"Un
    petit peu."


    -"Qu'est-ce qu'elle
    a dit ?"


    -"Que je devrais avoir
    honte et qu'il ne fallait pas que je le dise."


    -"Vous avez une petite-amie
    ?"


    -"Oh non, maman ne
    veut pas."


    -"Vous avez envie
    de faire votre service militaire ?"


    -"Maman veut que je
    le fasse oui."


    -"Qu'est-ce que vous
    faites pendant vos loisirs ?"


    -"Je lis."


    -"Qui vous donne les
    livres ?"


    -"Je vais les chercher
    à la bibliothèque catholique où maman m'a inscrit."


    -"Comptez-vous quitter
    vos parents quand vous aurez fini vos études ?"


    -"Oh non, je suis
    trop jeune et puis je veux suivre de longues études. Maman voudrait
    bien que je sois professeur à l'université."


    -"Et vous, ça vous
    plait cette idée ?"


    -"Oh oui et puis maman
    a toujours raison vous savez."


    -"Bon, Je ne suis
    pas certain que ce soit le meilleur service à vous rendre mais je vais
    tout de même vous reformer P4."


    -"Qu'est-ce que c'est
    P4 ?"


    -"Ça veut dire que
    ce n'est pas la peine de venir faire votre service militaire."


    -"Mais en cas de guerre,
    qu'est-ce que je ferai ?"


    -"Soit vous resterez
    chez vous soit vous serez à l'arrière."


    Et sur ce, il me tend mon
    carnet militaire. La comédie est terminée, j'ai ce que je voulais:
    un an de liberté de plus à ma vie ! Je contiens ma joie, ce serait
    dommage de tout gâcher maintenant. Je sors lentement de la caserne,
    je passe sous le porche en fer forgé et je longe l'allée royale d'un
    pas mesuré. Je tourne enfin au coin de la rue, je donne un petit coup
    d'oeil derrière moi, ça y est, je suis hors de vue ! Yahouuu ! Je
    bondis en l'air de joie ! Mission accomplie ! Génial !


    Je fonce à la gare prendre
    le premier train sur Le Mans où, dés mon arrivée, je téléphone
    chez moi.


    -"Allo Maman ? Hey
    ! C'est moi ! Je suis reformé ! C'est génial ! Pas d'service militaire
    tu t'rends compte !?"


    -"Et ça te réjouis
    toi !? Non mais qu'est-ce que tu as encore dû leur raconter pour qu'ils
    te mettent dehors !? Ah ça va faire bien quand tu chercheras du travail
    dans l'Education Nationale ! Ah vraiment Pascal, tu me feras mourir
    de soucis!"


    -"Ben enfin, ça te
    fait pas plaisir que j'évite de perdre mon temps pendant un an ?"


    -"Et qu'est-ce que
    tu vas faire à la place hein ? Tu peux m'le dire ? Depuis quand t'as
    pas été en cours ?"


    -"Ouais, ok M'man,
    t'inquiète pas, faut qu'j'y aille là, j'te laisse. Salut !"


    C'est pas vrai quand même,
    jamais contente la mère ! Finalement, j'ai de la chance de ne pas être
    comme celui dont je jouais le rôle à Rennes, il s'en est peut-être
    fallu de pas beaucoup, peut-être même qu'il est là d'ailleurs, le
    demeuré !


    Nish





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